Au Portugal, où la justice est indulgente malgré les lois, la nuit semblait durer toute une vie.
Assis sur le lit, Alexandra* et ses deux frères se tenaient les uns les autres comme si leur simple présence pouvait les protéger. À 9, 7 et 5 ans, ils ne savaient pas comment nommer le bruit provenant de la pièce voisine.
À l'intérieur, le père, que Alexandra appelait "l'homme", criait de plus en plus fort. La mère pleurait de plus en plus fort.
Et un jour, avec les cris, vinrent les coups, les poussées, les coups de poing. "La nuit semblait être un cauchemar sans fin.
C'était une terreur qui ne semblait jamais se terminer. Je pensais qu'au lever du jour, les choses changeraient, mais le lendemain ne venait jamais", se souvient Alexandra, aujourd'hui adulte, comme si elle était à nouveau dans cette pièce, écoutant cette violence, agrippée à ses frères sur le lit. Il s'est écoulé 41 ans depuis qu'elle a été témoin des premiers coups et insultes de son père envers sa mère, mais c'est comme si c'était hier.
Aujourd'hui, Alexandra sait comment nommer cela : violence domestique.
Elle sait que cela existe dans des milliers de foyers portugais, que cela tue des femmes et laisse des enfants orphelins. Les données de 2016, indiquent que la Commission Nationale de Promotion des Droits et de Protection des Enfants et des Jeunes a enregistré 14 575 enfants et jeunes qui avaient été exposés à des situations de violence domestique.
Parmi ce total, 5 880 cas avaient été signalés l'année précédente, 1 375 étaient des procédures rouvertes et 7 320 ont été engagées cette année-là.
La Commission a également identifié 218 cas de mauvais traitements physiques dans le contexte de la violence domestique, dont 116 avaient été signalés en 2015, 19 étaient des cas rouverts et 83 étaient de nouveaux cas. De nombreuses maisons semblaient avoir des nuits sans fin.
Inês a vécu dans l'une de ces maisons.
"Mon père frappait ma mère et je me cachais derrière la porte pour écouter, remplie de peur."
À 9 ans, contrairement à Inês, elle ne savait pas encore que le son de la force des coups de son père sur le corps de sa mère l'accompagnerait pour toujours.
Elle espère que tout se terminera bientôt, que le "père sera arrêté" et qu'elle et sa mère pourront "déménager dans une maison rien que pour elles". Mais c'est trop tôt pour assimiler une telle douleur.
"On ne peut pas comprendre ce qui se passe. On n'a même pas la structure pour porter un jugement", se souvient Alexandra.
Dans le refuge où Inês et sa mère rêvent d'un avenir meilleur, la fillette a recommencé à jouer.
"Elle cache la tristesse que son père est responsable de la douleur qu'elle ressent", raconte la mère, espérant que sa fille puisse effacer les souvenirs les plus douloureux de son enfance. Inês a vu son père frapper sa mère de nombreuses fois.
D'autres fois, elle l'a entendu. Même si elles sont maintenant en sécurité, il y a toujours des moments où elle se souvient et se réveille effrayée.
À l'école, en écoutant la matière, ou en rentrant chez elle, elle craint que son père ne la suive. Comme si le présent était toujours menacé par un retour au passé.
De temps en temps, Alexandra revient toujours à ces nuits interminables, qui semblent durer toute une vie. Pendant un instant, elle revit la même peur, le même cauchemar, la même solitude.
Et elle pense à ceux qui sont toujours pris dans cette situation de peur, de terreur et de solitude.
"Ces enfants souffrent énormément. Ils n'ont pas les mécanismes pour inverser ce qu'ils ont vécu. Leur monde est influencé par ce que nous avons vécu. Ils risquent de rester piégés dans un cycle de violence, en tant que victimes ou agresseurs", déclare Margarida Medina Martins, fondatrice et vice-présidente de l'Association des Femmes contre la Violence (AMCV).
Certains de ces enfants, environ deux tiers d'entre eux, arrivent dans des refuges accompagnés par leurs mères. Ils perdent leur père, devenant ainsi des orphelins d'un père vivant qui les a agressés.
Et certains d'entre eux perdent aussi leur mère. Ils perdent à jamais une partie d'eux-mêmes, leur innocence. Tous vivent une souffrance qui devrait être interdite par la loi.
Tout comme la violence qui ne diminue pas, la douleur qu'ils ressentiront restera à jamais présente.
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